Embrasser le Rhône : Roquemaure

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Le Provence Express assemble les patrimoines communaux au sein d’un récit métropolitain partagé.

Pour franchir le Rhône entre Orange et Roquemaure, on trouve 4 générations de ponts : celui de la LGV, celui de l’autoroute A9, celui de la D976 et l’ancien pont du 19e (le “pont-fantôme” du train des Déportés de Sorgues). Avant le village, il faut traverser l’espace agricole de la grande île Miémar.

Aussi bucoliques soient-ils, les paysages de Roquemaure sont très aménagés, voire parfois construits de toutes pièces. Comme un polder formé des alluvions rhodaniens, la grande île de Miémar (avec son canal de Roquemaure) est ainsi une création humaine, en l’occurrence même une création privée. Le lit du Rhône a été tant modifié depuis des siècles, qu’une ville portuaire a même pu se retrouver coupée de son fleuve !

Roquemaure marque en effet l’emplacement d’un grand port historique du Rhône, longtemps fleuve-frontière entre le royaume de France et l’Empire germanique. L’ancien château et le port, en cours de réappropriation aujourd’hui par la ville pour créer un espace qui rassemble les habitants, plongent au cœur de cette histoire oubliée.

Située sur la frontière orientale du territoire français, sur la “côte du Rhône”, Roquemaure est le berceau de l’appellation, marquée “CDR” au fer sur les tonneaux de vin de son célèbre vignoble. Une grande partie du territoire de Roquemaure est toujours un vignoble (côtes du Rhône, Lirac, Tavel). Historiquement célèbre pour la qualité de ses vins, Roquemaure a connu bien avant Châteauneuf-du-Pape des problématiques de protection de son vignoble contre la fraude, et de protection de son appellation de « Côte du Rhône”. C’est de ces problématiques de fraude, de la grande crise du phylloxéra et de la concurrence des vins d’Algérie, que suite à la crise viticole de 1907 naquirent les « appellations d’origine contrôlée”.

A l’emplacement d’un ancien moulin dont les ailes projetaient dans le village une ombre qui faisait peur aux chevaux, sur la crête d’une petite chaîne marquant la “faille de Roquemaure”, une vue à 360° sur tout le territoire communal et au-delà. Au milieu des vignobles et du Rhône, on observe les TGV et les flux autoroutiers. La construction de l’autoroute A9 (d’Orange à la frontière espagnole), livrée en 1978, raconte l’histoire des grands chantiers de la vallée du Rhône (centrales électriques, autoroutes, barrages, LGV…) qui ont animé nombre de communes entre les années 1950 et 1980. Les habitants qui étaient enfants dans les années 1970 se souviennent de cette ambiance de grands chantiers du Rhône et de l’autoroute, où la commune, fourmillant d’hommes et de machines, était « un véritable Eldorado ».

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Le château de l’Hers depuis la halte portuaire de Roquemaure sur la digue.

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Les restes du “pont fantôme”, construit en métal en 1840, détruit pendant la Seconde Guerre mondiale, reconstruit en 1955, puis démoli en 2000.

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La bucolique rue des Cubières, à l’arrière du château de Roquemaure, autrefois situé sur une île.

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Le château sur son île, et la vieille ville dans ses remparts, bien avant la création de la grande île de Miémar : maquette de Roquemaure à l’office de tourisme.

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